Etape01: choix du sujet
Premier croquis pour répondre à la question:"Qu'allons nous dessiner ? "
L'illustration en question a pour but d'être offerte. Sur papier, et
non pas publiée sur le net. Elle va donc être regardée à la fois dans
son ensemble, mais aussi dans les détails. Je vais donc jouer sur les
deux tableaux.
Les dés sont jetés: nous allons donc dessiner une rue, un homme accoudé
à un toit de Cadillac (qui n'a pas reconnu la Cadillac ?), regardant
par dessus son épaule un groupe d'hommes au pied d'un immeuble
haussmanien.
C'est évidemment sommaire au niveau graphique. ça permet
d'identifier quels éléments je vais faire et c'est aussi une base de
réflexion que je vais corriger pour arriver à ma composition.
Etape02 : un peu de documentation
Je ne sais pas pour vous, mais je n'ai pas la science infuse en matière
d'immeuble haussmanien. Plutôt que de faire n'importe quoi, je fais une
photo de l'immeuble à coté de chez moi.
Je trouve important de respecter les détails, l'exactitude des formes,
l'esprit dans les objets, les décors. Souvent, ça ne coute pas plus
cher, et ça donne une vraie atmosphère au dessin.
Bon, pour la Cadillac, c'est autre chose, j'en avais déja fait avant.
Etape03 : crayonné et composition
A partir de mon premier schéma, je replace les éléments: le perso
principal était en plein milieu et déséquilibrait l'image: je le
redescends. Je change la main qui tient la clope pour lui croiser les
bras. Surtout, je positionne les axes principaux de mon dessin: je vais
avoir un axe vertical, la façade de l'immeuble, qui fera descendre
l'oeil jusqu'au groupe des trois hommes et un axe en biais qui va mener
vers la tête du perso principal. Le coeur de l'action, à savoir le
regard que le mec de devant lance aux trois autres, est ainsi
habilement mis en valeur !
Vous noterez que au passage, j'ai sucré deux étages à l'immeuble.
L'exactitude, la précision des détails, tout ça tout ça, on s'asseoit
dessus, il faut bien que mon master en reconversion immobilière serve à
quelque chose...
Le crayonné n'est pas précis, ça ne servirait à rien, vu qu'on va tout écrabouiller sous des masses de noir.
Etape04 : positionnement des masses
Une étape que, il y a peu, j'étais obligé de recommencer moults fois et
qui me ramenait systématiquement à l'étape03. A force d'en faire, je
visualise intérieurement plus rapidement une composition qui va
fonctionner. Je fais cette phase sous photoshop. Je mets mon crayonné
en mode produit, mais ça ne sert pas à grand chose, et je place
grossièrement les masses de noir pour voir si je vais bien pouvoir
faire ressortir tous les éléments importants, si la disparition de
certaines formes dans la masse ne gêne pas la lecture.
En l'occurence, la main avec la cigarette n'avait rien pour la faire
ressortir et je lui ai donc rajouté du décor derrière (à ce stade, je
ne sais pas encore ce que c'est). Il ne faut pas hésiter à faire
disparaitre plein de traits qu'on avait fait lors du crayonné.
D'ailleurs, c'est pour ça que je fais des crayonnés si sommaires: c'est
un crève-coeur d'effacer d'un coup de marqueur un crayonné super
travaillé.
On travaille en masse, quelques simples ébauches de traits blancs suffiront à donner le volume de l'immeuble.
Je vais réaliser le ciel avec une texture de noir. Sous photoshop, je
modélise ça par du gris, puisque ça va me permettre de détacher à la
fois des zones blanches et des zones noires.
A ce stade, je lance une fléchette sur ma collection de Tardi en
le maudissant, puisqu'on ne peut désormais plus dessiner un immeuble
parisien en noir et blanc sans que ça fasse penser à lui.
Etape05 : encrage
Je retranscrit sommairement mon crayonné (déja sommaire) sur une
feuille de bonne qualité (papier technique canson 160g) au moyen d'une
table lumineuse pakistanaise (je mets juste une feuille par dessus
l'autre, si vous avez une vraie table lumineuse, ça sera plus facile).
Et c'est parti pour l'encrage:
Je commence par les contours des masses. Une habitude, parce que dans le cas d'un dessin pour le net, je ne vais pas plus loin.
On m'a dit que pour chaque litre d'encre de Chine que j'utilise, un
ours meurt dans le Sahara, alors pour faire des économies, je fais
maintenant les masses sous photoshop après avoir fait les contours sur
ma feuille. Exemple:
Le dessin tel qu'il est sur ma feuille, et tel qu'il est visible sur le net, après trois coups de pot de peinture:
Bon... dans ce cas la, je ne peux pas faire cette ruse puisque je vais offrir l'original, et je vais donc
patiemment remplir mes masses avec mon gros marqueur (l'amour de ma
vie).
Quelques petites bavures pour donner une texture "élimée" au pardessus
de notre personnage principal, c'est un peu facile, mais ça fait son
petit effet à peu de frais.
Etape06: Tamponnage
En hommage à Chn1 (Allah bénisse ses pas), nous allons maintenant
réaliser une voute impassible pleine de tourments rêveurs et de tas
d'autres trucs sympas. Pour ce faire nous allons utiliser de l'encre de
chine et un tampon, en l'occurence, une mousse. La mousse est un outil
agréable, mais fort peu précis. Si on avait des formes simples (objet
convexes peu incurvés, par exemple), ça serait pas grave. Si on avait
des formes pas trop compliquées, on pourrait promener un cache sur la
feuille (une petite feuille par exemple) pendant le tamponnage. Si
c'était pour le net, on pourrait rattraper des erreurs avec photoshop.
Mais la, on n'a pas trop le droit à l'erreur, donc on met du Tesa sur
les bords et du drawing-gum sur les endroits stratégiques qui doivent
rester immaculés.
Ensuite on va tamponner gaiement, mais sans trop appuyer, sinon on va
perdre tout le bénéfice de la texture. Tout en tamponnant, on peut
essayer de faire des dégradés pour faire ressortir telle ou telle zone,
faire des motifs de nuages, etc...
Après avoir retiré le drawing-gum, on constate avec félicité que le
blanc est blanc. Pour les tourments rêveurs, on repassera, je n'ai pas
réussi à dessiner des formes dynamiques dans le ciel (motif: je ne les
avais pas préparé avant) et du coup, c'est un peu au petit bonheur la
chance.
Etape07: finitions
Il ne reste plus que quelques détails à rajouter. Pour ce faire, on va
utiliser des stylos 005, pour que certaines zones puissent être
regardées de près:
En l'occurence, la lumière de ce groupe de personnes n'est pas gérée de
façon réaliste: j'ai tout blanchi pour qu'il se détachent nettement du
fond noir, et je n'ai souligné que quelque éléments qui déterminent une
expression: visage, position des mains. Sur ce détail, on remarque que
le tronc de l'arbre de droite descend trop bas et fausse la
perspective: un coup de pinceau malheureux.
Après un gommage appliqué, et l'enlevage du Tesa (qui permet d'avoir un cadre "sans cadre"), on a le résultat final: